L’execution remarquable de Mme de Brinvilliers,
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Transcription
Mais ce seul mot me rend toute esperdue,
Me faut mourir dessus un echaffaut.
C'est pour punir mes trop cruels deffauts,
Et aujourd'huy on abrège ma vie
Pour expier mes grandes perfidies.
On n'a jamais veu femme dans le monde
Ainsi que moy faire crimes immondes;
J'ay irrité et la terre et le ciel,
Et j'ay commis de grands péchés mortels,
Car j'ai tué par poison mon cher frère
Lequel m'aimoit d'une amour singulière
J'avois en main certain apotiquaire
Que je payois d'une bonne manière,
J'avois aussi un fripon de laquais
Lequel faisoit à peu près mes souhaits,
Je leur donnois de l'argent grande somme,
Et eux passoient toujours pour honneste-hommes.
De ce poison le traistre apotiquaire
Me fournissoit de beaucoup de manière:
Il enfaisoit pour un an, pour six mois,
Il m'en donnoit ainsi que je voulois
Que je faisois prendre comme une infame
A ceux de qui je voulois ravir l'ame.
Dieu tout puissant permit que ce perfide
Lequel estoit devant luy homicide
Vint à mourir, et que ses héritiers
Parmi ses biens, richesses et papiers
Trouverent las! la maudite cassette
Là où estoit le poison manifeste.
On reconnut ma grande perfidie,
Comment j'avais las! abrégé la vie
A mon frère qui me chérissoit tant,
Dont à présent j'ay le coeur mal content;
Dans l'ame j'ay très-forte repentance:
Ma teste va servir de pénitence.
Mon laquais pris, en prison on le mene
Où on luy fit souffrir beaucoup de peines,
Il raconta toute ma trahison,
Comment j'usois de ce maudit poison;
Pour ce sujet il fut mené en Grève,
Où il mourut en peines très-grièves.
Moy je m'en fuis en grande diligence
Abandonnant le royaume de France,
Je fus roder de pays en pays
Bien éloignée de parens et amis,
Pour me sauver je fus en Angleterre,
En [la] Hollande et plusieurs autres terres.
Mais Dieu, lassé de mes crime et offence
A suscité un officier de France
Qui me connut et viste me saisit:
En sauve-garde [tout] soudain il me mit,
Et à Paris on m'ameine bien viste:
Pour m'amener j'avois fort bonne suite.
Mon procès fait, ce coup il faut paroistre
Sur l'echaffaut, c'est pour couper ma teste,
Auparavant je fais déclaration
De mes forfaits et mauvaises actions,
Car j'ay commis des actions si noires
Qu'il n'y a point d'écrites dans l'histoire.
Comme j'ay dit, j'ay fait mourir mon frère
Par le poison d'une mort très-amère,
Je croyois bien faire mourir mon mary,
Mais le poison n'eut pas pouvoir sur luy:
Diligemment il usa de remede,
Et son remede à mon poison succede.
J'ay bien pis fait, mais je ne l'ose dire,
J'ay fait mourir mon pere en [grand] martyre,
En luy donnant de ce maudit poison
L'ay fait pâtir longtemps dans ma maison
Et à la fin il est mort comme etique,
Par ma fraude et ma noire pratique.
Je demande pardon à mon cher pere,
Pareillement aussi à mon cher frère,
Je demande pardon à mes parens,
Je demande pardon à mes enfans,
Je demande pardon à l'assistance,
Je meurs, je meurs avec grand repentance.
Mon cher mary, pardon je vous demande
D'avoir commis une faute si grande;
Je croyois bien vous tuer par poison
Bien préparé par ma grand trahison,
Mais Dieu très-bon vous conserve la vie:
La mienne va ce coup estre finie.
Ce n'est pas tout que de perdre la vie,
Mes entrailles s'en vont estre rotties,
Et dans ce lieu on va brùler mon corps,
Encor qu'il soit déjà au rang des morts,
Contemplez moy, très-illustre noblesse:
Ma sentence me réduit en faiblesse.
Method of Punishment
Crime(s)
Gender
Date
Execution Location
Notes
image is from another pamphlet, Musee Carnavalet, estampe HIST PC 001 TerG (in Bastien, execution publique a Paris)
Wikipedia: Marie-Madeleine-Marguerite d'Aubray, Marquise de Brinvilliers (22 July 1630 - 17 July 1676) conspired with her lover, army captain Godin de Sainte-Croix to poison her father Antonine Dreux d'Aubray in 1666 and two of her brothers, Antoine d'Aubray and Franois d'Aubray, in 1670, in order to inherit their estates. There were also rumors that she had poisoned poor people during her visits to hospitals.
She appears to have used Tofana poison, whose recipe she seems to have learned from her lover, the Chevalier de Sainte Croix, who had learned it from Exili, an Italian poisoner, who had been his cellmate in the Bastille. Her accomplice Sainte-Croix had died of natural causes in 1672.
In 1675, she fled to England, Germany, and a convent, but was arrested in Lige. She was forced to confess and sentenced to death. On 17 July 1676, she was tortured with the water cure, that is, forced to drink sixteen pints of water. She was then beheaded and her body was burned at the stake.
Her trial and the attendant scandal launched the Affair of the Poisons, which saw several French aristocrats charged with poison and witchcraft.
Madame de Sevigné: Encore un petit mot de la Brinvilliers : elle est morte comme elle a vécu, c'est-à-dire résolument. Elle entra dans le lieu où l'on devoit lui donner la question ; et voyant trois seaux d'eau : Œ‚ C'est assurément pour me noyer, dit-elle ; car de la taille dont je suis, on ne prétend pas que je boive tout cela. Œé Elle écouta son arrt, ds le matin, sans frayeur ni sans foiblesse ; et sur la fin, elle le fit recommencer, disant que ce tombereau l'avoit frappée d'abord, et qu'elle en avoit perdu l'attention pour le reste. Elle dit à son confesseur, par le chemin, de faire mettre le bourreau devant elle, Œ‚ afin de ne point voir, dit-elle, ce coquin de Desgrais qui m'a prise : Œé il étoit à cheval devant le tombereau. Son confesseur la reprit de ce sentiment ; elle dit : Œ‚ Ah mon Dieu ! je vous en demande pardon ; qu'on me laisse donc cette étrange vue ; Œé et monta seule et nu-pieds sur l'échelle et sur l'échafaud, et fut un quart d'heure mirodée, rasée, dressée et redressée, par le bourreau : ce fut un grand murmure et une grande cruauté. Le lendemain on cherchoit ses os, parce que le peuple disoit qu'elle étoit sainte. Elle avoit, dit-elle, deux confesseurs : l'un disoit qu'il falloit tout dire, et l'autre non ; elle rioit de cette 1676 diversité, disant : Œ‚ Je peux faire en conscience tout ce qu'il me plaira : Œé il lui a plu de ne rien dire du tout. Penautier sortira un peu plus blanc que de la neige : le public n'est point content, on dit que tout cela est trouble. Admirez le malheur : cette créature a refusé d'apprendre ce qu'on vouloit, et a dit ce qu'on ne demandoit pas ; par exemple, elle dit que M. Foucquet avoit envoyé Glaser, leur apothicaire empoisonneur, en Italie, pour avoir d'une herbe qui fait du poison : elle a entendu dire cette belle chose à Sainte-Croix. Voyez quel excs d'accablement, et quel prétexte pour achever ce misérable. Tout cela est encore bien suspect. On ajoute encore bien des choses ; mais en voilà assez pour aujourd'hui.